Un réseau dense et complexe d’accords régissant les relations UE-Suisse
La Suisse compte parmi les principaux partenaires économiques de l’Union européenne. Elle est en effet le 4ème partenaire de l’UE pour le commerce de marchandises, le 3ème partenaire de l’UE pour le commerce des services, ainsi que le 2ème investisseur dans l’UE et la 2ème destination des investissements étrangers européens. La relation politique est néanmoins marquée par des périodes de rapprochement, alternées de crises.
Ainsi, suite au référendum suisse du 6 décembre 1992, débouchant sur le refus de ratifier l’accord de participation à l’Espace économique européen, la Suisse a souhaité privilégier le développement de ses relations avec l’Union européenne par la voie bilatérale et donc de tisser un réseau dense et complexe d’accords sectoriels.
A l’heure actuelle plus de 120 accords bilatéraux – dédiés à la libre circulation des personnes, les transports terrestres, les transports aériens, les marchés publiques, les obstacles techniques au commerce et l’agriculture – lient la Suisse à l’Union européenne, suite aux étapes suivantes :
- 1972: accord de libre-échange
- 1999 : première série d’accords sectoriels (ou « accords bilatéraux I ») sur les questions de la libre circulation et de l’ouverture des marchés respectifs : transport aérien, transport terrestre, marchés publics, produits agricoles, recherche (notamment la participation de la Suisse à la coopération en matière de recherche au sein de l’UE, dont notamment les programmes-cadres de recherche de l’UE) ;
- 2004 : seconde série d’accords sectoriels (ou « accords bilatéraux II »), essentiellement sur le renforcement de la coopération économique et sur l’extension de la coopération en matière d’asile et de libre circulation à l’intérieur de l’espace Schengen ; MEDIA (accès des cinéastes suisses aux financements européens) ; l’environnement (la Suisse devient membre de l’agence européenne pour l’environnement) ;
Un accord-cadre pour une interprétation et mise en œuvre homogène des accords sectoriels
Depuis plusieurs années l’Union européenne et la Suisse négocient un accord-cadre institutionnel afin de « trouver des solutions institutionnelles horizontales pour pouvoir adapter les accords de façon dynamique à l’évolution de l’acquis de l’UE, interpréter les accords de façon homogène et mettre en place un mécanisme indépendant de surveillance et de contrôle juridictionnel ainsi qu’un mécanisme de règlement des différends ». En effet, l’application de ces accords bilatéraux nécessite une mise à jour et une adaptation régulière de ceux-ci à l’évolution de la législation européenne, avec des enjeux importants de sécurité juridique liés à l’interprétation du droit, à la surveillance de l’application des accords concernés et à la résolution des différends dans leur mise en œuvre.
La conclusion d’un tel accord est perçue par l’UE comme étant non-seulement nécessaire pour sécuriser les acquis de la voie bilatérale, mais également un préalable incontournable pour la poursuite et l’intensification des relations dans les domaines d’intérêt commun, notamment la poursuite de la participation aux programmes de recherche et d’innovation Horizon Europe, l’approfondissement de la coopération dans le domaine de la santé publique et de la sécurité alimentaire ou encore de l’énergie.
Des négociations de longue date entre la Suisse et l’Union européenne
Les négociations sur un accord-cadre institutionnel – dont l’idée est évoquée depuis 2002 – ont connu plusieurs phases de crispation importantes. Celles-ci ont été lancées le 22 mai 2014 entre l’Union européenne et la Suisse et ont été clôturées au niveau politique le 23 novembre 2018. A l’issue de ces négociations avec l’Union européenne, le Conseil fédéral Suisse a annoncé vouloir lancer une vaste consultation nationale des acteurs politiques, économiques et sociaux suisses afin de s’assurer du soutien de ceux-ci. A l’issue de celle-ci, en avril 2019, un certain nombre de questions ont été soulevées par la Suisse, dont trois principales toujours en discussions : les aides d’État, la protection des salaires et la directive sur la citoyenneté qui élargit l’accès aux prestations sociales.
Le rejet par près de 62% des électeurs suisses de l’initiative « Pour une immigration modérée » fin 2020, a ouvert la voie à un nouveau cycle de négociation entre l’Union européenne et la Suisse. Cependant, après plusieurs mois de négociations, ainsi qu’une rencontre le 23 avril dernier entre le président de la Confédération Suisse, Guy Parmelin, et Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, l’accord-cadre institutionnel s’inscrit dans un horizon toujours aussi incertain, le blocage sur les trois sujets mentionnés subsistant. Cependant, dès le 30 avril dernier la secrétaire d’Etat suisse, Livia Leu, et la négociatrice de l’UE, Stéphanie Riso, directrice-adjointe du cabinet de la Présidente Ursula von der Leyen, ont repris les négociations afin de trouver une voie de sortie pour faire aboutir cet accord essentiel pour les deux parties.
Un accord global entre l’UE et la Suisse, s’il devait advenir, permettrait de renforcer la coopération entre les acteurs du Grand Est et des cantons suisses voisins, par exemple à travers des coopérations pour la recherche et l’innovation dans le cadre du programme « Horizon Europe ».